Jean Noël : Éditorial : La colère de Dieu

La vision qu’à Nietzsche du réel est le très héraclitéen fleuve indomptable, et celle de la réalité humaine, une toile d’araignée d’eau tissée par dessus le fleuve, qui « tient », d’une certaine manière, au gré de l’habileté des créateurs tissant leur toile par-delà les secousses tempétueuses d’un courant parfois imprévisible. Aussi, l’homme en tout temps, constate éberlué que ce n’est jamais fini. Il voudrait se reposer, se réfugier, « se planquer », mais non, ce n’est jamais fini. Sa pulsion de vie l’incite à prolonger le voyage et de mettre à profit tout son génie pour créer et offrir un horizon aux générations futures, sa pulsion de vie lance lointainement la flèche de son désir dans le pays de ses petits enfants, la pulsion de mort l’incite à tout détruire pour se laisser couler dans le fleuve, à laisser libre cours à sa colère monstrueuse pour se tuer en tuant les autres, ne souffrant de subir l’horrible hasard, les embuches contrariantes, l’idée, finalement, oui, que ce n’est ja